Pourquoi la police est-elle raciste ?

Pourquoi la police est-elle raciste ?

Mi-juillet 2023, L’Humanité a publié une note officielle étudiant le racisme dans la police. Pas de « racisme systémique », affirme celle-ci, qui n’a rien d’un document à charge. Cela n’a pas empêché le gouvernement de s’opposer à sa publication, terrifié qu’il est à l’idée de se froisser avec son bras armé. Pourtant, le racisme de la police est difficilement contestable. Par-delà les phénomènes récurrents et les rappels à l’ordre de l’ONU au sujet des « profonds problèmes de racisme » de la police française, les chiffres ne mentent pas : d’après le Cevipof, 60 % des policiers comptaient voter pour le Front national en 2021 (et 74 % des policiers actifs). La nature du xénophobisme sauce RN a peut-être mué au fil des années, mais il est toujours aussi constitutif du parti.

Le constat étant posé, il convient de s’interroger sur les causes. La première est évidente : la perception générale de la population étant parfaitement lucide sur le sujet, il s’ensuit que les rares aspirants policiers présentent plus naturellement le tropisme raciste (faute de quoi, ils postuleraient ailleurs). Il y a ainsi un racisme qui s’infuse dans l’institution depuis les individus.

Un aspect moins évident est celui qui va dans le sens inverse : le fait que l’institution produit elle-même du racisme. La configuration du métier de policier aujourd’hui, axé majoritairement sur la répression des quartiers populaires, conduit à des rapports « eux contre nous » qui ne peuvent se structurer qu’en haine de l’autre.

C’est sous cet angle qu’il faut comprendre les messages racistes circulant sur des boucles WhatsApp de policiers : ils ne sont pas le symptôme, mais la maladie. Ainsi que les chirurgiens, réputés pour leur humour potache, ne peuvent affronter leur métier que s’ils parviennent à voir un corps plutôt qu’un patient, la tâche abjecte du policier n’est supportable qu’à la condition que l’autre soit un sous-homme. Dans les deux cas, l’humour et le langage sont les opérateurs de cette déshumanisation indispensable1On pardonnera donc volontiers les blagues pas forcément fines des médecins, parce qu’elles les aident à sauver des vies, mais pas celles des policiers qui les détruisent..

Le racisme de la police est donc plus que systémique ; il est consubstantiel de la fonction. Tant que la doctrine de maintien de l’ordre restera centrée sur la confrontation, il ne pourra en être autrement.

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